Après avoir travaillé chez Fauchon et dans le catering, Ariane Delmas s’est lancée en 2011 dans la restauration, en créant les Marmites Volantes. L’objectif : rendre l’alimentation durable la plus accessible possible. En bio, en circuit court, sans gaspillage… et avec succès !
C’est l’histoire de quatre trentenaires bien diplômés, qui décident de partir à l’aventure en montant un restaurant, dans le populaire XIXe arrondissement de Paris. Et pas un de ces restaurants de burgers à 20 euros, non ! Un restaurant à prix abordables où l’approvisionnement se ferait en circuit court, majoritairement bio, un vrai souci de son empreinte carbone (sans réfrigérateur ni micro-ondes), et un objectif de zéro-déchets.
« Seule une de nous quatre avait une expérience en restauration, raconte Ariane Delmas. Mais nous voulions montrer qu’un autre monde était possible que ce que nous connaissions. Et donc, monter un restaurant autrement. »
Prendre soin de ses ressources… et les développer
Les quatre associés mettent sur le papier leurs engagements. Parmi ceux-ci, un engagement social (recrutement de personnes en sortie de parcours d’insertion priorité aux CDI, management « qui préserve les ressources humaines ») ; et un engagement environnemental : des produits bruts, bio, locaux et de saison, achetés en circuit court. « Pour nous, c’était une évidence, raconte la co-fondatrice. Cuisiner bio, c’est comme cuisiner en pleine conscience – dans le respect à la fois de la terre, de celles et ceux qui produisent la nourriture… et de celles et ceux qui la mangent ! » Le modèle économique ? Ce sera l’entreprise, classique. « Etre durable, c’est aussi trouver ses ressources propres, insiste Ariane. Créer de l’emploi était une autre de nos motivations ; et pour cela, il faut être rentable. » Pour assurer cette rentabilité, une activité de livraison est associée au restaurant, dès le début du projet. Trois ans plus tard, le pari est gagné. Et douze ans après la création, les Marmites sont plus chaudes que jamais.
Démonstration par l’exemple
L’entreprise emploie aujourd’hui 31 salariés, sur trois activités : le restaurant, la livraison (en vélos électriques) – et la restauration collective. Ariane Delmas, toujours aux manettes, est devenue également co-présidente du label Ecotable Écotable – pour une restauration écoresponsable (ecotable.fr).
Car la bio est toujours au coeur des Marmites : au restaurant où il représente une moitié des produits ; pour la livraison qui se développe (une deuxième cuisine centrale est en projet) ; mais aussi dans la restauration collective et les cantines scolaires, avec 65 % de bio – et des ambitions assumées pour l’avenir, sans rien renier des engagements de départ.
« Nous voulons montrer que la cantine peut être à la fois gourmande, durable et compétitive », résume Ariane Delmas, qui prône la démonstration par l’exemple. Les cantines sont livrées à vélo elles aussi, avec des gâteaux maison et du lait proposé à partager dans des verres, à l’ancienne au lieu des bricks individuels. Moins d’emballages, plus de bio (local), et plus de goût ! Une vraie leçon, aussi : « pour tordre le cou aux idées reçues selon lequel le bio serait trop cher, il faut réfléchir et inventer. Vouloir copier-coller les modes de consommation existants n’aurait pas de sens » Aujourd’hui, les Marmites volantes font manger 1 400 enfants dans 17 cantines privées – et l’entreprise compte bien aussi, à moyen terme, fournir des écoles publiques. Une gageure, pour une petite structure dans un marché de géants.
Un pas a déjà été franchi en remportant un marché public à Aubervilliers, où l’entreprise régale en petits-déjeuners 6000 enfants des écoles de la commune. Avec même du 100 % bio pendant un mois !
Mais au fait, d’où viennent les produits ? Pour la majeure partie, ils viennent en direct de cinq producteurs (maraîchage ou élevage) situés autour en Région parisienne ou non loin. Des producteurs que l’entreprise a parfois accompagné dans leur conversion vers le bio, et auxquelles les Marmites restent fidèle. Importants, les réflexes acquis après des années à travailler ensemble ! On peut être volante et aussi terre-à-terre : quand il n’y pas de carotte une semaine donnée, la cuisine s’adapte.
Le secret de la Panna cotta aux épluchures de pommes bio
… Et puisqu’il est question de démonstration par l’exemple, faisons donc l’expérience.
C’était il y a quelques mois, sur le Salon de l’Agriculture. Tandis qu’à midi l’Agence Bio présente les résultats de son Baromètre, Ariane Delmas s’est déplacée elle-même, avec une salariée, pour assurer le service. Quatre grands sacs sont arrivés par vélo-cargo, avec des marmites. Les assiettes sont faites sur place (carnées ou végétariennes selon la demande de chacun), on ramasse verres et plats qui repartiront dans les sacs avec les marmites. Mais le plus important : que mange-t-on ? En apéritif, des tortillas (œufs bio de Mayenne, pommes de terre de Seine-et-Marne), du « brocamole » (guacamole à base de brocolis) ; en plat principal, une assiette complète avec crudités bio venues de l’Oise, un mijoté lentilles-épinard (lentilles bio d’Ile-de-France) ou un curry d’agneau, pour soigner ses papilles et son empreinte carbone. Et en dessert, une pana cotta au délicieux coulis de pommes bio… dont on apprendra après coup qu’il était fait à base d’épluchures. Ne rien gâcher, non : c’est aussi ça, l’esprit bio. Et c’est encore meilleur.