Pour la nourriture des enfants, elle a tout quitté. Parente d’élèves militante, elle s’est formée à la nutrition puis pris la Présidence de Nourrir L’Avenir, qui accompagne les acteurs de la restauration collective partout en France pour que leurs cantines passent au 100% bio, 100% fait-maison, et le plus local possible.
Il y a un peu plus de 10 ans, la vie d’Isabelle Bretegnier, alors laborantine, bascule face à la piètre qualité de la restauration collective proposée à ses enfants. Elle co-fonde avec d’autres parents le collectif « Pas d’usine, on cuisine !», et elle entreprend en parallèle une reconversion professionnelle pour être diététicienne nutritionniste, spécialisée en alimentation bio. « Le CNED permettait de la faire à son rythme, je l’ai fait en 3 ans pour prendre le temps de vraiment faire la bascule de changement de vie et m’y dédier pleinement ».
Et dans la vie d’Isabelle, il y a beaucoup de rencontres, de parents, de producteurs, d’élus, de formateurs… Tout un écosystème animé par l’envie de mieux faire manger les enfants. Devenue formatrice, Isabelle s’entoure de compagnons de lutte pour former en 2020 la SCIC (société coopérative d’intérêt collectif) Nourrir l’Avenir qui prend véritablement son envol : « Nous comptons environ 200 adhérents au sein de l’association le Collectif les Pieds dans le Plat, et une quarantaine de formateurs déjà actifs et 10 autres vont nous rejoindre. On sent que ça explose en termes de demandes. Nos parrain et marraine, Olivier Roellinger et Brigitte Mercier Fichaux y sont pour beaucoup en mettant en avant une cuisine climato compatible, délicieuse, et parfaite pour la santé ».
Au quotidien, ils forment donc des agents de cuisine collective aux rudiments d’une cuisine anti-gaspi, empreinte des six piliers de l’agriculture biologique, et même au-delà puisqu’ils travaillent avec des races anciennes et des semences paysannes. « Les six piliers, c’est une évidence. Des Même pour le moins mais mieux de viande : mes amis de Dordogne, quand ils mettent un cochon au four, c’est la bête entière et tout est mangé sans exception ! ». La Dordogne est d’ailleurs en train de passer sous la houlette de son président Germinal Peiro, au 100% bio et fait maison pour ses 35 collèges, et cela s’étend aux communes.
Évangélisant dans tout l’hexagone avec ses collègues, Isabelle est basée à Romainville (93), en Ile de France où l’histoire bio est en train de se faire selon elle : « nous commençons ce qui paraissait impossible dans une école primaire à Romainville, et dans un établissement public d’état, le Lycée Internat d’Excellence Jean Zay dans le 16è à Paris. A chaque fois, des rencontres, professeurs et chefs d’établissements impliqués, et tout suit. La seule réserve des décideurs porte sur les coûts, mais nous leur montrons qu’en changeant nos recettes, on tient sans mal : à Romainville nous sommes passés de 7,35 euros par repas à 6,38 en maîtrisant le coût matière et en jouant par exemple sur les grammages réduits en protéines animales. Chez nous, une bolognaise peut comporter 20g de bœuf par enfant et être complétée avec des protéines végétales, et c’est succulent ! ».
Dès les premières semaines de fonctionnement de l’école de Romainville le gaspillage par enfant est passé de 95/120grammes à 35/45 grammes.
La formation en diététique et en cuisine, l’accompagnement pour les achats et la maîtrise chiffrée du plan alimentaire 100% bio et fait maison prend une grande place dans l’essor de Nourrir l’Avenir. Le logiciel « À table » porté par le département de la Dordogne et le Collectif les Pieds dans le Plat, simule les besoins totaux des établissements pour trouver la bonne quantité de produits bio en circuits courts auprès des producteurs. Ces derniers apprécient évidemment une démarche qui leur redonne de la visibilité au point qu’un certain nombre d’entre eux sont prêt à changer leur mode de production et passer au 100% bio pour répondre aux besoins de la restauration collective saine et durable. En regardant en arrière, Isabelle doit penser à la maxime de Mark Twain, « des innocents ignoraient que la chose était impossible, alors ils l’ont fait » et se dire que cela ressemble bigrement à ce qu’elle fait chaque jour.