Qu’on se le dise, manger bio ne signifie pas automatiquement manger maigre et équilibré. On peut tout à fait assumer un certain lâché prise culinaire en respectant au mieux l’environnement et en donnant des gages aux paysans bio. Avec ses 27 restaurants partout en France, la chaîne Bio Burger pèse à elle seule plus de 3% de la consommation de bio en restauration commerciale. Et son fondateur Louis Frack ne compte pas s’arrêter là.
Né en 1988, 9 ans après l’ouverture du premier Mc Donald’s en France, Louis Frack est de la génération burger. Après l’avoir fréquenté enfant, dès le lycée l’iconique enseigne le laisse froid : « mes parents comme ceux d’Anthony (Darré, son associé fondateur) mangeaient bio et nous avaient sensibilisé à l’importance des méthodes de production da la nourriture. De tempéraments entrepreneurs, nous avons tous les deux faits une école de commerce et dès le départ avons planché sur notre projet qui n’existait pas alors : des burgers de qualité. Et les conseils de nos parents nous sont revenus en mémoire car il nous semblait que le bio était un marqueur de traçabilité et de qualité intrinsèque ».
Sortis diplômés en 2011, les deux jeunes ouvrent leur premier restaurant à Paris et s’investissent sans compter, depuis les commandes fournisseurs jusqu’aux cuisines et à la gestion de la salle. Malgré de grandes difficultés logistiques et de chaîne d’approvisionnement, ils parviennent à ouvrir une deuxième adresse grâce à l’aide financière de proches. Paradoxalement, c’est en grandissant qu’ils réalisent que leur modèle économique ne marche pas : « nous tenions jusque-là car on étaient au four et au moulin ce qui diminuait nos dépenses, mais dès nos premières embauches, on a vu que le modèle était en péril. Alors, on a repensé la chaîne de valeur et développé une centrale d’achats pour rationnaliser. Ça a été le changement déterminant qui nous a permis de garder jusqu’à aujourd’hui notre envie de départ : être en 100% bio, au prix du marché ».
Et le groupe a rapidement grandi jusqu’à sortir de Paris en 2017. Après une année record avec 6 ouvertures en 2024, il compte désormais 27 restaurants partout dans le pays. Encore estampillé enseigne métropolitaine, le concept commence à séduire des villes moyennes comme Salon de Provence (Bouches du Rhône) où la mairie a été happé par la perspective d’une enseigne familiale et qualitative. « On ne ment pas sur ce qu’on propose : nous proposons une cuisine riche, on est dans le lâché prise, la gourmandise ! Et c’est tant mieux de ne pas cantonner le bio aux salades de lentilles, même si j’adore ça. Mais ce qu’on propose, c’est du cuit sur place, du frais et des portions raisonnables. Et on propose aussi des espaces enfants dans tous nos restaurants pour que les parents puissent souffler un peu ! ».
27 restaurants c’est beaucoup pour deux associés, mais peu comparés aux 170 000 établissements du pays. Et pourtant, avec leur approvisionnement exclusivement bio, ils pèsent entre 3 et 4% du bio en restauration collective en France et 1% de la viande bovine en bio en France. Une fierté autant qu’une interrogation : « on crée quelque chose pour les agriculteurs, nos volumes leur permettent de planifier. Ce qui m’étonne, c’est qu’il n’y ait pas plus de monde sur le marché, nous sommes toujours seuls alors qu’il est évident que la demande est là : regardez dans la mode avec des entreprises comme Veja, Patagonia, Loom ou 1083, il y a de nombreux acteurs qui montrent qu’on peut fabriquer des produits engagés dans la transition écologique en gardant le même prix car tout le monde n’est pas prêt à dépenser plus pour sauver la planète. Pour autant, on a mené une grosse enquête auprès de nos clients et parmi les 15 raisons qui les poussent à venir chez nous, le bio est numéro deux juste après la qualité et avant même le goût, preuve que nos valeurs comptent et passent ! ».
A l’avenir, Louis entend continuer à grandir, mais tranquillement et en tentant de limiter son impact en diminuant la part de bœuf qui représente 65% des burgers, contre 20% de burgers végétariens, part qui continue de monter « et ils le choisissent pour le goût, pas pour l’option végé ! C’est l’effet burger camembert pané ». Le trublion du bio continue à faire adhérer un nombre croissant de consommateurs avec de nouvelles recettes même si les volumes nécessaires au bio ne favorisent pas toujours l’expérimentation : « on voudrait faire des onion rings ou du poulet pané, mais c’est dur de trouver des volumes de ces produits sans sortir de nos prix et en restant local, mais on va trouver, faut juste savoir prendre le temps ». Quand il ne gère pas ses restaurants, Louis pratique l’ultramarathon, des courses pouvant aller jusqu’à 160 kilomètres. De quoi apprendre la patience bien sûr, et de quoi brûler les calories pour pouvoir manger quelques burgers sans mauvaise conscience !