“Le bio étranger, c’est du faux bio”

“Vous avez goûté les tomates soi-disant bio espagnoles ? C’est immangeable. Le bio espagnol est un faux bio, car les fruits et légumes espagnols ne respectent pas les normes françaises.”. Ainsi s’exprimait Ségolène Royal¹, en direct le 30 janvier 2024 sur BFM TV…

Un peu d’histoire :

En 1985, l’Etat Français établit le label AB qui définit comment sont produits, transformés, contrôlés et vendus les aliments biologiques.

En 1991, l’Union Européenne établit un règlement au niveau européen pour les productions végétales a été adopté, élargi au secteur animal en 1999.

Cette règlementation a permis d’harmoniser les pratiques des différents États membres et il a été décidé en 2009 de réunir les bio sous une seule bannière, un seul logo bio européen pour les 27 pays de l’Union : l’Eurofeuille.

Désormais seul logo obligatoire, il est parfois et le plus souvent accompagné du label AB facultatif mais plus connu car plus ancienn. Le logo AB est peut être indiqué sur l’étiquetage des produits qui ont l’Eurofeuille même en dehors de la France. Par exemple du thé bio produit en Inde, et certifié par un organisme certificateur agréé par la Commission Européenne est autorisé à mettre l’Eurofeuille s’il respecte le règlement bio européen et par ricochet le logo AB si le producteur de thé en fait la demande à l’OC.

Mais le règlement s’applique de la même manière partout et pour tous, avec les mêmes autorisations et interdictions partout. Le glyphosate par exemple est bien interdit en bio partout, dans les 27 pays membres.

La seule chose qui varie vraiment entre les états membres, ce sont les autorisations de mise sur le marché, qui relèvent de choix nationaux. En France, c’est l’ANSES qui s’en charge.

L’autre point qui peut expliquer l’idée d’une différence entre pays est le plus ou moins grand usage des serres pour les cultures. La France avait un temps interdit la vente des légumes « ratatouilles » bio cultivés sous serres chauffées en France entre le 21 décembre et le 30 avril. Cette décision ayant été annulée par le conseil d’État en juin 2023, il est possible aujourd’hui en France de produire en bio dans des serres chauffées. Mais la législation continue à évoluer, ainsi l’usage des énergies renouvelables est recommandé dès aujourd’hui et sera obligatoire en 2030.

Pour être pointilleux, on peut préciser que le règlement bio européen est sujet à interprétation. Ainsi, quand il stipule pour l’élevage que « les animaux doivent pâturer dès que les conditions météo le permettent », tout le monde n’a pas la même interprétation du beau temps…

Avec 85 000 opérateurs (producteurs, transformateurs, distributeurs) certifiés en bio, le bio n’étant pas une auréole de sainteté mais un marché qui peut avoir des fraudeurs. Mais avec plus de 120000 contrôles/an (soit 1,5 contrôles par opérateur), par des organismes certificateurs agréés et eux-mêmes contrôlés, ils restent minoritaires. La DGCCRF rajoute des contrôles lors de la vente des produits pour s’assurer que le mot bio, et ses logos, ne sont pas utilisés à tort.

Au sujet du goût des dites tomates, il faut garder en tête que le label rouge est le seul signe officiel de qualité qui parle de goût. Là encore, avec 61000 producteurs de bio, il peut y avoir du bio dont le goût laisse à désirer, et encore, c’est subjectif et nous laissons à Ségolène Royal son verdict…

¹Le 30 janvier 2024 sur BFM TV

“De toute façon, le bio aussi est contaminé”

Cette idée invaliderait le concept même de bio tant qu’il ne couvre pas 100% du territoire…

Oui, les champs bio peuvent être parfois contaminés par des produits synthétiques utilisés par d’autres fermes non-bio.

Non, les fruits et légumes bio que vous trouvez au supermarché ne sont pas contaminés.

D’abord, rappelons qu’en principe les traitements culturaux sont utilisés de façon ciblée sur les cultures à protéger, et de fait restent en grande partie dans le champ. En revanche, selon les molécules et les conditions météorologiques, certains produits peuvent partiellement se disperser dans le sol, l’eau ou l’air.

Le règlement bio proscrit les produits chimiques et impose une période de conversion allant de 2 à 3 ans avant de pouvoir être certifié bio. Cette période de conversion est un temps nécessaire pour assainir les sols qui ont pu être pollués avant le passage en bio. Parmi les sources possibles de contamination, il faut aussi compter la rémanence de produits phytosanitaires dans les sols, car il faut parfois plus de 20 ans de gestion biologique pour éliminer les traces de certains pesticides et autres engrais azotés¹. Le FIBL (institut de recherche européen en agriculture biologique) a compilé plusieurs études démontrant que « les sols biologiques contenaient beaucoup moins de résidus que les sols conventionnels et des concentrations de résidus inférieures de 70 à 90 % ». Cette étude montre le nombre de substances était deux fois moins élevé dans les champs biologiques, et les niveaux de résidus étaient neuf fois moins élevés. Cette étude montre que l’agriculture biologique contribue à dépolluer les sols.

10 % des terres agricoles françaises sont en bio. Cela signifie donc que 90% des terres sont potentiellement traitées avec de la chimie synthétique. Conscient de ce voisinage avec les fermes dites « conventionnelles », l’agriculture biologique se protège de différentes façons.

De plus, pour éviter les contaminations, et donc se protéger des épandages de produits chimiques synthétiques interdits en bio par des voisins non bio, les agriculteurs bios ont adapté leurs pratiques en plantant des haies ou des bandes enherbées.

Malgré ces protections, des contaminations restent possibles – en cas de dérive du voisinage, par ruissellement avec l’eau, ou de volatilisation par le vent de molécules trop légères – c’est le cas par exemple du prosulfocarbe, dont le monde du bio demande l’interdiction car il est extrêmement volatil et contamine le sarrazin bio par exemple.

Les Organismes Certificateurs (OC) qui contrôlent chaque année chaque producteur bio effectuent régulièrement des analyses sur des échantillons soit de façon aléatoire soit en cas de suspicion de potentielle contamination.

Si la présence d’une substance interdite en bio est détectée, le produit ne peut plus être commercialisé sous le label Agriculture Biologique.

Et si le seuil dépasse la limite maximale de résidus (LMR), le produit ne peut plus être commercialisé du tout. Voilà le consommateur protégé des contaminations éventuelles.

Est-ce que cela est fréquent ?

Le rapport de 2025 de l’EFSA, l’autorité européenne de sécurité des aliments, a fourni des résultats sur les analyses des échantillons prélevés en 2023 : sur les échantillons des produits biologiques, 80 % ne contenaient aucun résidu quantifiable et 19 % contenaient des résidus quantifiés égaux ou inférieurs à la LMR. 1,9% dépassaient la LMR, dont 0,4 % ont été jugés non conformes².

Le bio sous emballage : une protection contre les contaminations

On l’entend souvent : pourquoi donc les fruits & légumes bio sont-ils emballés dans les supermarchés ? Quand on se soucie de l’environnement, on n’a pas envie de voir un film plastique emballer ses produits. Certes, mais on n’a pas envie que le produit bio soit contaminé. Et c’est la loi. Pour ne pas tromper le consommateur, et différencier les produits bio des non bios, les produits bio sont emballés, sauf dans les magasins 100% bio.

L’occasion de rappeler que l’Agriculture Biologique est un règlement agronomique, et qu’il ne parle pas d’emballage.

¹En 2025, les médecins libéraux français ont qualifié de « bombe sanitaire » l’empoisonnement des sols français au cadmium – notamment dû à l’utilisation massive d’engrais fortement phosphatés. Une méta-analyse publiée en 2014 dans le British Journal of Nutrition, montrait que les aliments biologiques présentent en moyenne 48 % de cadmium en moins que les aliments issus de l’agriculture conventionnelle. La recommandation de Conférence nationale des unions régionales des professionnels de santé-médecins libéraux (URPS-ML) est claire : varier son alimentation et privilégier le bio (notamment dans les cantines) pour diminuer l’imprégnation au cadmium.

²Sur l’ensemble des produits, 58 % ne contenaient pas de résidus quantifiables, tandis que 38,3 % contenaient des résidus dans les limites légales et 3,7 % dépassaient la LMR, dont 2 % ont été jugés non conformes.

“Le bio, c’est pour les bobos (ou pour les riches)”

Ceux qui invoquent volontiers les « bobos » se gardent souvent de définir qui sont exactement ces « bourgeois bohèmes ».

Veut-on dire que le bio serait réservé aux bourgeois des centres-villes ? C’est faire bien peu de cas des 27 000 fermes bio qui vendent leurs produits en direct partout en France – du bio local, et à prix abordable. 27 000 points de vente, c’est plus que les 18 000 magasins cumulés par la grande distribution.

… Mais peut-être, quand on parle de « bobos », veut-on simplement dire que le bio est réservé aux riches. Là encore, on comprend l’argument. Mais des études se sont penchées sur la question : mange-t-on plus bio dans les foyers les plus aisés ? La réponse est non.

Selon le Baromètre de la consommation de bio, 7% des Français consomment du bio tous les jours. Cette fréquence de consommation varie peu selon les revenus : 9% des foyers les plus aisés (au-dessus de 2 500€ par personne par mois de revenus) mangent du bio tous les jours contre 8% pour les foyers qui gagnent entre 1000 et 1500€ par an par unité de consommation.

La consommation de produits bio reste tout de même très marquée sociologiquement : les plus diplômés sont ainsi 50% à consommer des produits biologiques au moins une fois par semaine (et 12% tous les jours), pour seulement 21% des personnes les moins diplômées (dont 5% en consomment quotidiennement). Les jeunes (moins de 34 ans) sont également plus nombreux que leurs aînés, et notamment les Français d’âge intermédiaire (35-64 ans) à consommer régulièrement des produits bio. En effet, 36% des moins de 34 ans consomment bio au moins une fois par semaine contre 27% des 45 à 64 ans. Les habitants de l’île de France consomment en moyenne plus bio (40% consomment au moins 1 fois par semaine contre 30% au total France), mais aussi les habitants de PACA (37%).

En réalité, ce que montrent toutes les études, c’est que la consommation de bio est bien plus une question d’éducation que de pouvoir d’achat. Est-ce si étonnant quand 63 % des Français se déclarent inquiets des effets de l’alimentation sur leur santé ?

C’est en partant de ce constat que l’association Vrac (Vers un réseau d’achat en commun) organise des sessions de cuisine bio dans les quartiers populaires. Portés par une autre association, les Défis Alimentation positive démontrent qu’avec un peu d’éducation populaire le bio (se) vit très bien loin des centres-villes. On peut citer aussi L’Ecole comestible, qui sensibilise les élèves des écoles primaires publiques aux bienfaits d’une alimentation durable à travers des ateliers collectifs.

En matière de bio, il y a des consommateurs et des citoyens. Loin des classifications de bobo ou bourgeois.

Et ce ne sont là que quelques exemples parmi bien d’autres. Au fond, on aurait pu se contenter de cette réponse : qu’on soit jeune ou moins jeune, qu’on vive dans une grande ville, une bourgade ou à la campagne, la santé est une question qui transcende tous les âges et toutes les classes sociales.

“Le bio, ça ne rémunère pas forcément mieux les producteurs”

Après avoir fustigé le bio « trop cher », les critiques du bio reproche au label qu’il ne rémunère pas mieux les producteurs. Si vous vous demandez comment un tel paradoxe est possible, c’est qu’à partir du moment où vous prétendez que le bio « ça n’est que de la com’ », les prix s’expliqueraient, selon eux, uniquement par du marketing et des marges des magasins (alors que c’est précisément l’inverse), mais laissant une part des producteurs dans le dénuement.

Impossible, ici, de donner un chiffre global pour tous les agriculteurs de ce pays tant les revenus fluctuent en fonction des secteurs de production. Pour autant, à tous ceux qui avancent que le bio ne tient pas la route en termes de performance économique, un dossier de la revue du ministère de l’agriculture Agreste de février 2024 avance que « les exploitations bio affichent généralement un niveau de rentabilité économique équivalent à celui des structures en mode conventionnel »¹. Ceci s’explique par le fait que les agriculteurs bios ont moins de frais, malgré une main d’œuvre plus importante à l’hectares, mais peu de dépendance aux pesticides de synthèse et d’engrais azotés (synthétiques) puisqu’ils n’en utilisent pas. Ce qui les rend moins fragiles quand le prix des engrais azotés (synthétiques) flambe…

La rémunération n’est pas le seul moteur de l’engagement à être en bio, il y a également des motivations en lien avec leur engagement (79%) et les raisons économiques interviennent dans seulement 37% des cas. D’après le baromètre du moral des agriculteurs.trices de l’Agence BIO 2025, 64% des fermes bio ont un chiffre d’affaires annuel inférieur à 100 000€ et 56% un revenu annuel disponible brut de l’exploitation inférieur à 10 000€. Les principaux besoins et revendications des agriculteurs bio ont un lien avec la performance économique de leur exploitation : des prix de vente rémunérateurs pour la production bio (94%), de la communication sur le bio auprès du grand public (92%) pour intensifier la

demande, un renfort des aides bio (89%), une baisse des charges (87%) et plus de moyens pour structurer les filières bio (86%).

Les autres moteurs de la conversion en bio sont surtout des motivations environnementales (93%), et liées à la santé (81%). 72% des répondants veulent préserver leur santé et celle de leurs proches et 62% préserver la santé de la population (contre 54% en 2023), motivation particulièrement importante chez les viticulteurs.

Enfin le bio est minoritaire dans le système alimentaire (6% de l’assiette des Français et 10% des terres agricoles françaises), et en tant que label agronomique il n’a pas la prétention de corriger les déséquilibres du marché et ne se soustrait pas aux règles du rapport de force économique.

Il n’est pas un label de commerce équitable, car cela n’est pas contrôlé par le cahier des charges, mais 78 % des produits du commerce équitable sont aussi labellisés bio ce qui garantit un prix décent aux producteurs.

¹Dans « Les performances économiques des exploitations en agriculture biologique en 2020 » Agreste n°1 février 2024

“Le bio, c’est cher”

« Tu manges bio ? Ben dis donc t’as les moyens ! ». Si l’on associe spontanément le bio à un niveau de vie très élevé (voir idée reçue n°2) c’est que le cadrage médiatique dominant présente invariablement le bio comme étant plus cher que le reste des produits.

Le bio peut être plus cher, mais pas toujours et pas partout. La grande spécificité du secteur c’est la diversité des canaux de distribution.

Concernant le bio en grande distribution, où se font 48% des achats de bio, seul circuit où l’on dispose des prix, l’institut Circana qui analyse les tendances de consommation, établit en 2025 que certains produits bio y sont 46% plus cher que leur homologue en conventionnel.

Si les consommateurs font la majorité de leurs achats en grande distribution, pour l’offre bio il existe un réseau de distribution spécialisé avec 2800 magasins comme Naturalia, Biocoop, La Vie Claire, Marcel et Fils, Bio C Bon etc. indépendants ou liés à une chaîne. A eux tous ils représentent 29 % du marché bio.

Selon les rédactions de Circuits Bios et de Biolinéaires en 2023 sur plus de 60 produits, les fruits et légumes bio seraient 18% moins chers dans les magasins spécialisés qu’en grande distribution¹. Les prix très variables d’un magasin à l’autre et difficilement comparable aux gammes des supers et hypermarchés généralistes car les produits sont différents.

Par ailleurs, on parle beaucoup du local, parfois en l’opposant au bio mais les Français ont choisi les 2 : 15% des produits bio passent par la vente directe à la ferme, circuit en hausse même pendant la crise du bio.

Plus de 27 000 fermes bio vendent leurs produits en direct sur le territoire, cela représente un maillage plus fin que les 18 000 points de vente cumulés des Leclerc, Carrefour, Auchan, et autre Intermarché…

Dans ces fermes (que vous pouvez géolocaliser sur l’Annuaire de l’Agence BIO), les prix sont très souvent plus que compétitifs et pour cause, aucun intermédiaire ne prend de commissions sur les ventes.

Enfin, cuisiner, en bio, c’est déjà activer l’un des six leviers permettant de faire baisser la facture finale. On peut par exemple privilégier le circuit court qui ôte les coûts de transports pour l’agriculteur. Il est également possible de s’orienter vers le vrac qui permet d’avoir les justes proportions et ne payer que ce qu’on consomme. Evaluer sa consommation de viande, et l’ajuster aux recommandations du Programme National Nutrition Santé et réinvestir une quantité excessive vers une plus grande qualité

L’anti-gaspillage permis par l’absence de produits ultra transformés aide au réemploi, des légumes en soupe ou des fruits en compotes par exemple. Ajoutez à cela la saisonnalité : des mirabelles coûtent beaucoup moins cher fin août quand les arbres croulent sous le poids des fruits qu’en février quand on doit les importer…

¹Emilie Mayer, Circana

“Bio et végane, c’est un peu la même chose, non ?”

On pourrait répondre en un mot : ça n’a rien à voir ! L’agriculture biologique est un mode de production (y compris de viande, de lait ou d’œufs). Le mode alimentaire végan (ou végétalien) bannit les produits animaux mais aussi les produits d’origine animale.

Assimiler bio et véganisme, c’est un peu comme additionner des choux et des carottes. Ou des tomates et du saucisson.

Pour autant, la confusion existe. Peut-être parce que, dans l’esprit de certains, bio et véganisme sont deux « trucs de bobos » qu’il est facile de mettre dans le même sac des mangeurs de tofu et des militants de la cause animale.

Il est vrai que le monde de la bio a été pionnier pour les régimes dits d’éviction (sans gluten, végétarien…). Les magasins bio ont été les premiers à mettre en avant les protéines végétales, à vendre du tofu et des galettes de céréales.

Parmi les consommateurs réguliers de bio, 10 % se disent strictement végétariens (Etude Bionutrinet), ils consomment des produits laitiers mais pas d’animaux ni d’œufs. Ils sont donc légèrement sur-représentés que dans la moyenne française qui serait de 2,2% (source FranceAgriMer).

Il n’existe pas de donnée précise sur les véganes, qui refusent tout produit d’origine animale (y compris le miel), et qui représenteraient moins de 1 % de la population.

Le bio est, par essence, omnivore. Le règlement de l’agriculture biologique repose en effet sur le principe d’équilibre entre le sol, l’eau, les végétaux et les animaux – notamment parce que le fumier, les fientes et le lisier issus de l’élevage sont essentiels pour fertiliser les sols et leur apporter de la matière organique sans utiliser d’engrais chimiques. En clair : vive les bouses de vache et les fientes de poules pour faire pousser légumes et céréales !

Voilà pourquoi, dans les fermes bio, on trouve souvent à la fois des cultures et de l’élevage (voir Idée fausse n° XX : oui, il existe de la viande bio). Sur 61 000 fermes bio, un tiers d’entre elles comptent à la fois des cultures végétales et de l’élevage. En général, elles destinent certaines de leurs parcelles à des prairie destinées spécifiquement à l’alimentation animale : ainsi, les animaux des fermes bio mangent bio et local, conformément au règlement.

Mais alors… Les bio mangent-ils autant de viande que le reste de la population ? L’étude Bionutrinet montre que les consommateurs réguliers de bio, sans être nécessairement végétariens ou véganes, respectent plus volontiers les recommandations du Plan National Nutrition Santé, qui recommande la consommation de 300 à 500g de viande par semaine hors volaille. Or, le ministère de l’agriculture montre qu’en 2022, les Français ont consommé 56 kg de porc, mouton ou bœuf, soit 1,1 kg par semaine en moyenne.

On peut donc piloter notre budget en cuisinant des lasagnes aux poireaux bio (un délice) ou du Dahl de lentilles corail avec des carottes et des épinards (succulent et protéiné !), pour s’offrir de la meilleure viande au repas suivant. Bon appétit !

Et puis en bio ce qu’on déteste par-dessus tout, ce sont les produits chimiques de synthèse ultra transformés ; on veut du naturel. Mieux vaut un bon steak d’une vache qui a eu des jours heureux dans nos pâtures, qu’une pilule synthétique remplie de protéines.

“Le bio abîme et épuise les sols par le labour et le cuivre”

On entend parfois dire : « les bios sont pour le labour, et labourer abîme le sol ». Si vous entendez ce discours, votre interlocuteur enchaînera probablement en vantant les mérites d’autres techniques comme l’agriculture régénérative ou encore l’agriculture de conservation des sols, lesquelles visent la régénération des sols et proscrivent le labour, imposent la couverture permanente des sols et diversifient les espèces cultivées.

Mais faut-il vraiment opposer ces approches et le bio ? Non !

Le règlement bio vise aussi à produire dans un sol vivant et à maintenir la fertilité des sols. En effet, il est indiqué que la production végétale biologique a recours à des pratiques de travail du sol et des pratiques culturales qui préservent ou accroissent la matière organique du sol, améliorent la stabilité du sol et sa biodiversité, et empêchent son tassement et son érosion.

Le cahier des charges de l’agriculture biologique autorise néanmoins le labour pour ne pas utiliser des herbicides, mais aussi pour aérer le sol, enfouir les matières organiques et les résidus des cultures précédentes pour nourrir la suivante, et casser le cycle de certaines maladies. Mais le labour n’est pas une obligation. D’autres formes de travail du sol plus en superficie existent avec des outils adaptés.

N’opposons pas bio et régénératif : on peut parfaitement être l’un et l’autre.

En revanche, il n’y a pas de définition légale ou réglementaire de l’agriculture régénérative, il s’agit d’un concept dont la base scientifique est peu fournie, et les interprétations nombreuses.

Depuis une dizaine d’années, les recherches s’accélèrent pour adapter l’agriculture bio au non-labour, et notamment pour trouver des solutions pratiques d’élimination des adventices (le terme utilisé en agriculture pour parler des « mauvaises herbes »).

C’est d’ailleurs au sein de la famille bio qu’est né le concept d’agriculture régénérative, qu’on doit notamment au Rodale Institute et à la Regenerative Organic Alliance d’Elisabeth Whitlow (« organic » étant le mot anglais pour désigner l’agriculture biologique). Mais à la fin des années 2010, l’expression « agriculture régénérative » a été reprise par de grands groupes de l’agro-alimentaire pour verdir leur approche productiviste, avec de nouveaux labels qui interdisaient certes le labour… mais autorisaient le glyphosate. Dès lors, nous n’avons pas de preuve scientifique que l’on peut « régénérer » avec du glyphosate, ce qui explique que les Agences de l’Eau ne soutiennent pas financièrement l’agriculture dite régénérative. Sauf si elle est bio.

L’autre sujet clivant : le cuivre – notamment dans les vignes, où la « bouillie bordelaise » est utilisée comme fongicide, autorisé en bio, et qui nuit à la vie des sols.

Or, l’utilisation de cuivre est strictement encadrée (4 kg/an et par ha), en bio comme en non-bio. Et que les produits utilisés comme fongicides par les viticulteurs qui n’utilisent pas de cuivre sont souvent classés CMR (cancérogène mutagène reprotoxique).

Et attendant que les recherches en cours permettent de trouver une alternative à l’utilisation de cuivre, notons que jamais un captage d’eau potable n’a été fermé à cause d’une accumulation de cuivre. Alors qu’on en ferme plusieurs centaines par an pour cause de contamination aux nitrates ou aux pesticides… La France compte environ 33 000 captages d’eau potable. Toutefois, plus de 14 000 ont été abandonnés depuis les années 1980, notamment en raison de pollution aux nitrates et pesticides synthétiques.

“20 % de bio dans les cantines, c’est impossible, ça va faire exploser le prix des repas”

Si vous n’êtes pas parent d’élève, ou élu.e d’une collectivité locale, la question vous paraîtra peut-être incongrue.

Pourtant, ce chiffre de 20% de bio est dans la loi EGalim de 2018 qui fixe comme objectif minimum 20 % de bio en restauration collective (cantines, hôpitaux, restaurants universitaires, restauration d’entreprise) à l’horizon 2022.

En 2024, sur l’ensemble des 81 300 cantines de France, la moyenne était sous les 7%. Un peu plus selon ma-cantine.gouv, le site de l’Etat où les restaurants collectifs les plus appliqués déclarent leur taux de bio.

Ce qui fait dire à certains, un peu vite, que ce 20% était impossible. Pourtant, des dizaines de cantines le font déjà, avec 20 30, 50, même 100% de bio pour coût matière entre 1,80€ et 2,80€ pour prendre l’exemple de la restauration scolaire

Le coût matière (ou coût denrée) d’un repas ne représente qu’entre 20 et 30% du coût total d’un repas (hors dépense d’investissement), entre 20 et 25% pour les chef.fes partenaires du programme CuisinonsPlusBio. D’après l’ADEME, le surcoût lié à l’introduction de produits bio en restauration collective scolaire serait de

1) 0,08 € pour 20% de produits bio + 1 repas végétarien hebdo et limitation du gaspillage à environ 60g

2) 0,20 € pour 50% de produits bio + 2 repas végétarien hebdo et limitation du gaspillage à environ 60g

Avec 40 000 repas préparés quotidiennement, la Cuisine Centrale de Toulouse utilise 31% de produits bio. Besançon achète pour 46% de bio pour préparer ses 5000 repas. Et Epinal 44% pour ses 300 repas préparés. Et les étiquettes des maires engagés prouvent que le bio n’est ni de gauche, ni de droite.

Les départements gèrent les cantines des collèges : dans la Drôme 30 collèges dépassent les 27% de bio, en Dordogne 34 collèges sont à plus de 20%.

Dans les lycées, qui relèvent des Régions, les niveaux d’introduction de bio sont plus faibles, 9,5% pour 2024.

Mais, avec près de 22% en moyenne de bio dans ses 95 lycées, la région Bretagne est la première à atteindre l’objectif EGalim !

Que ce soient des élus de gauche, ou de droite, des grandes ou petites villes, des territoires ruraux, dans chaque configuration il y a des pionniers qui font la preuve que respecter la loi EGalim, et même la dépasser est possible dans faire banqueroute.

Il a fallu d’abord une volonté politique pour bousculer les habitudes. Par exemple créer ou développer des filières locales d’approvisionnement, pour pouvoir faire du pain bio local il faut des moulins, des silos à grains, voire des boulangeries directement à la ferme pour transformer le blé du territoire.

Il y a plusieurs raisons à cela. La première, c’est que le coût des denrées elles-mêmes ne représente que 25 % du coût total d’un repas. Ensuite, le passage en bio s’accompagne en général d’un changement de pratiques. Il ne s’agit pas de remplacer chaque produit par son équivalent en bio.

Il s’agit surtout de cuisiner plus de produits frais, plus de produits bruts et d’utiliser moins de produits transformés et surtout ultra transformé. En achetant de grandes quantités ou en groupant les achats, les cantines peuvent bénéficier de prix attractifs auprès de producteurs locaux. Par ailleurs, les cantines bio limitent le gaspillage : on peut utiliser toute la carotte, par exemple, en se contentant de gratter la peau sans l’éplucher et gagner 15% de matière en plus.

Compass, gestionnaire de cantine, avait identifié dans sa filière du Centre Val de Loire que la viande bio perdant 20% d’eau en moins à la cuisson, cela était bon pour l’équilibre matière ».

Par ailleurs les bios sont pionniers dans l’art d’avoir de beaux restes pour lutter contre le gaspillage et recycler en soupe ou gratin.

Si les 20% de bio étaient effectivement achetés par la restauration collective, alors cela créerait un débouché potentiel supplémentaire de près de 2M€ (deux milliards d’euros, en prix de gros).

Que ce soit les élu.es, ou les responsables de cantines, ou les fonctionnaires territoriaux, des structures23 les aident, et ils échangent entre pairs. Les mairies qui ont des fermes municipales pour approvisionner les cantines ont créé récemment un club d’échanges de bonnes pratiques.

Et pour ravir les enfants avec des recettes originales, ou pour donner aux cuisiniers des idées bio, il existe désormais des guides de recettes adaptées aux collectivités – on pourra recommander ainsi le livre de Pierre-Yves Rommelaere, « La cantine autrement », lui qui a connu les restaurants gastronomiques et qui œuvre aujourd’hui dans la cantine d’un collège de l’Aude.

Introduire plus de bio en restauration collective c’est possible ! Pour cela, quelques clés :

  • Réduire le gaspillage alimentaire : le gaspillage est souvent le premier levier activé car il permet de mobiliser tous les acteurs autour d’un objectif commun
    • Au total celui-ci représente 30% des denrées achetées (production et service inclus)
    • En lycée on a calculé que 120g jetés par repas coûtent 0,68€/repas.
  • Respecter les saisons permet de limiter l’impact des variations de prix
  • Réduire le nombre de composantes des repas : beaucoup d’établissements sont passés de 4 à 5 composantes
  • Ajuster les portions
  • Cuisiner plus de produits bruts
  • Connaitre son territoire et son offre et pas seulement celles des fournisseurs traditionnels, pour cela l’Annuaire bio est un outil clef
  • Former les gestionnaires et les personnels de cuisine
  • Disposer d’outils performants de gestion de stock pour mieux piloter les achats

“On ne nourrira pas le monde avec du bio”

Le bio serait incapable de nourrir la planète. Plus qu’une production agricole, le bio se rapprocherait de la lubie sympathique, une version un peu améliorée du jardinage, en somme. Et comme il faut nourrir la planète, il faut accepter les inconvénients de l’agriculture avec chimie synthétique et herbicides, et laisser le bio au rang des loisirs de riches.

C’est aussi une question de répartition. Et de gaspillage : selon l’ONU, 1 milliard de repas sont gaspillés chaque jour. Cette déperdition colossale se passe à 60% au domicile des ménages, 28% dans les restaurants et 12% dans les magasins…

Cette idée reçue et portée par les détracteurs du bio sous-tend que les rendements du bio sont inférieurs et que le bio ne peut pas être généralisé. C’est de moins en moins vrai. L’utilisation massive d’engrais azotés en agriculture standard a appauvri les sols et les rendements n’y augmentent plus. Selon la filière et la région, le rendement en bio peut être inférieur à l’agriculture standard. De l’ordre de 15 à 25% de rendements en moins, par exemple, pour grandes les cultures. Peut-on dire pour autant que l’on ne pourrait pas nourrir tout le monde ? Pas avant d’avoir établi comment on veut nourrir humains, animaux d’élevage et voitures.

Actuellement, les deux tiers des cultures de céréales en Europe sont destinés à la nourriture animale. Si comme le recommande la FAO nous mangions des légumineuses 2 fois par semaine, alors des terres agricoles destinées à produire des céréales pour de l’élevage, ou du colza et des betteraves pour du biocarburant pourraient être employées pour des légumineuses, protéines végétales pour l’alimentation, notamment humaine et surtout très peu gourmandes en phytosanitaires, et nécessaires en bio pour réenrichir le sol faute d’engrais synthétiques.

Moyennant une diversification des sources de protéines consommées par l’homme et une réduction du gaspillage, selon l’étude collective publiée dans Nature en 2017, il est possible de nourrir 9 milliards d’êtres humains en 2050 avec 100 % d’agriculture biologique. Ce résultat est sur le point d’être conforté à l’échelle française par une étude récente de l’INRAE / Métabio.

Toutefois, cette perspective est encore loin, la France en 2025 est à 10% de ses terres en bio.

“Le bio, ce n’est pas vraiment meilleur au goût”

Si le goût est éminemment subjectif, en revanche le bio n’a pas pour revendication d’être « meilleur » au goût. Seul le label Rouge, autre Signe de Qualité Officielle garanti par l’Etat ; prend en compte les caractéristiques organoleptiques d’un aliment. La certification bio, elle, dit comment est cultivé, élevé, ou transformé le produit : sans pesticides et engrais de synthèse, sans herbicides, sans OGM, en plein air, sans additifs de synthèse. Mais ne dit rien du goût final.

Dans un secteur à 12Milliads de chiffre d’affaires, il y en a pour tous les goûts. Des produits de terroirs tels le maroilles Bio ou l’abricot Bergeron bio, mais aussi des vins qui sentent le foin, des yaourts un peu aigres, ou du pain trop cuit. Et c’est normal, c’est un label agronomique, pas gastronomique. Toutefois, l’agronomie peut avoir un effet sur le goût. Nombreux sont certains chefs, cuisiniers, consommateurs, qui disent privilégier le goût du produit au bio, mais les deux sont tout à fait compatibles. Même souhaitable. Selon l’étude des chercheurs français Magali Delmas et Olivier Gergaud paru en février 2021 dans la revue Ecological Economics et fondée sur la notation de dizaines de milliers de vin : les vins bios sont mieux notés (en moyenne 6 points de plus) par les Parker, Revue des Vin de France et autres guides et revues dont ils ont compilé les notes en les croisant avec la labellisation ou non des vins. Pour expliquer un tel écart, les deux chercheurs citent plusieurs travaux indiquant que le recours moindre aux pesticides et fertilisants de synthèse permet de conserver la biodiversité des parcelles, la faune et la vie microbienne des sols et donc d’exprimer plus vivement les « terroirs ».

“Le bio, c’est politique ”

Si l’eau potable et la population des abeilles sont politiques, alors oui, le bio l’est.

Les détracteurs du bio évoquent un « lobby bio ». Un lobby est une organisation qui a pour mission de défendre des intérêts particuliers. Or, en se dotant d’objectifs de développement, les Etats font la preuve que le sujet du bio, un sujet d’intérêt général et national, et pas un sujet de lobbying. A l’exception de quelques pays, les pays de l’Union Européenne sont tous dotés d’objectifs nationaux pour développer le bio, et de plans pluriannuels à cette fin.

En France, les objectifs sont de 18% de surface agricole utile (SAU) d’ici 2027, 21% d’ici 2030, et 20% dans les assiettes des cantines depuis 2022. En Autriche, l’Etat a aussi fixé 35% de SAU bio en 2030, 25% en Lettonie, Estonie, Finlande, et en Tchéquie. L’expression lobby bio est donc inappropriée. Les principes mêmes liés aux pratiques agricoles biologiques qui reposent sur un respect des équilibres naturelles en font une agriculture d’intérêt général. Les atouts reconnus par les scientifiques de l’agriculture biologique pour l’environnement, la biodiversité, la qualité des eaux, la santé des productions, des citoyens/consommateurs illustrent aussi cette dimension d’intérêt général. Au-delà d’être politique ou non, le bio n’est pas monolithique au sein de ses 85 000 opérateurs (producteurs, distributeurs, transformateurs). Parmi les 61 000 agriculteurs, ce qu’a en commun le petit agriculteur bio qui ne vend qu’en direct à sa ferme et sur les marchés avec de grands agriculteurs bio qui exportent leurs céréales ou leurs vins, c’est la certification bio qui atteste le respect d’un cahier des charges et des contraintes afférentes. Le quotidien d’un berger avec 100 brebis en estive dans les Pyrénées peut être très éloigné de celui d’un viticulteur à Reims qui exporte du champagne aux Etats-Unis. Il y a eu des pionniers du bio de tout bord politique, depuis ceux qui cherchaient l’autonomie vis-à-vis des grandes firmes commercialisant herbicides et pesticides de synthèse, jusqu’à ceux rêvant plutôt d’un retour à la terre et au passé. Le bio n’est donc ni de gauche, ni de droite. Il n’est pas une fin en soi, simplement un moyen pour avoir de l’eau potable et des abeilles.

“Le bio, ce n’est pas meilleur pour la santé”

Avant tout, rappelons que toutes les recommandations d’une alimentation équilibrée et bonne pour la santé s’appliquent au bio comme au non bio : manger trop gras, salé et sucré en bio reste un problème. S’empiffrer de burgers frits bio avant de conclure sur des glaces et gâteaux bios n’est pas un régime sain. Les excès de vin bio ne sont pas meilleurs pour le foie.

Pourtant, chaque bouchée mangée en bio réduit le trou de la sécurité sociale, et c’est la Cour des Comptes qui le dit.

Pour autant, les mangeurs de bio sont en meilleure santé comme le prouve l’étude Nutrinet, recherche épidémiologique de grande ampleur suivant une cohorte de 170 000 personnes depuis 2010 par l’INSERM. Au sein de cette cohorte, le sous-groupe Bionutrinet a suivi les effets d’une alimentation bio sur la santé et a établi qu’il y a un différentiel de 25% de cancers¹ entre le quart qui consomme le plus de bio et celui qui consomme le moins de bio.

Véritable Rolls mondiale de l’étude épidémiologique, cette étude n’oublie bien sûr pas de corriger les biais comportementaux sur les mangeurs de bio réguliers qui sont moins sédentaires, moins fumeurs, moins consommateurs de viande rouge et plus enclins à manger des légumes, des légumineuses et des noix… Plus les consommateurs mangent bio et plus leurs assiettes sont végétalisées, c’est aussi le constat fait dans le cadre de ce suivi au long cours.

Une autre expertise collective conduite par l’INSERM (2021) sur les liens entre « Pesticides et santé » avec plus de 5300 documents analysés montre de forte présomptions d’un lien entre l’exposition aux pesticides et six pathologies : lymphome non hodgkinien (LNH), maladie de Parkinson, myélome multiple, cancer de la prostate, troubles cognitifs, bronchopneumopathie chronique obstructive (BCPO) et bronchite chronique, et des présomptions moyennes pour d’autres cancers et les pathologies thyroïdiennes. Parmi ces pathologies, certaines d’entre elles sont reconnues par la Mutuelle Sociale Agricole (MSA) comme des maladies professionnelles liées aux pesticides : Parkinson, lymphome non hodgkinien et cancer de la prostate.

Autre sujet : l’antibiorésistance, à savoir la capacité d’une bactérie à résister aux effets des antibiotiques. L’antibiorésistance est responsable d’un million de décès par an dans le monde et pourrait toucher 39 millions de personnes d’ici 2050. L’absence d’antibiotiques dans les produits animaux est une réponse à la perte d’efficacité des traitements antibiotiques chez les humains, cela évite d’ingérer des antibiotiques à travers du jambon ou des nuggets. Il s’agit donc bien d’un enjeu de santé publique croissant auquel répond le bio puisque l’élevage bio limite drastiquement l’usage des antibiotiques, et ne les autorise qu’exceptionnellement sous encadrement du vétérinaire, par exemple quand une bête se blesse et que la plaie s’infecte, bien-être animal oblige. Garder l’efficacité des antibiotiques est d’ailleurs la première motivation des consommateurs suisses de bio. Enfin, rappelons les recommandations du Programme National Nutrition Santé, porté par Santé Publique France (ministère de la Santé), basées sur la recherche médicale en santé publique, et qui spécifie de manger plus de bio quand c’est possible : Les objectifs et principes du PNNS 2019-2023 était :

  • Augmenter la consommation de produits BIO dans la population de sorte que : 100% de la population consomment au moins 20% de leurs consommations de fruits et légumes, produits céréaliers et légumineuses issues de produits BIO par semaine.
  • Assurer la montée en gamme de la restauration collective par un approvisionnement de 50% de produits bio, durables et de qualité d’ici 2022 et promouvoir le Nutriscore dans ce secteur.

Ces recommandations témoignent là aussi de l’intérêt d’une consommation de produits bio, qui pourrait être considérée dans une démarche de prévention. La santé humaine ne peut se concevoir indépendamment de la santé de l’environnement et des animaux, c’est le concept Une Seule Santé / OneHealth.

¹Du sein post ménopause et de lymphome

“Les agriculteurs bio sont trop subventionnés”

L’agriculture française bénéficie d’aides publiques, que ce soit sous forme d’aides directes ou de crédits d’impôts, à la fois nationales ou européennes comme avec la PAC, Politique Agricole Commune.

Historiquement, la PAC est une aide à l’hectare qui favorise les fermes avec le plus d’hectares. Un « deuxième pilier » a été ajouté pour soutenir le développement rural et l’environnement. C’est dans ce cadre qu’existent des subventions spécifiques pour aider à la conversion en agriculture biologique, de 130 euros à l’hectare, qui sont versées pendant 5 ans, le temps de se convertir et d’atteindre la pleine productivité de la ferme en bio¹.

Chambre d’Agriculture France établit que la France perçoit chaque année autour de 9 milliards d’euros de la PAC pour ses 389 000 fermes.

Le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire calculait en juillet 2025, dans le cadre du Plan Ambition Bio, qu’une enveloppe globale annuelle de 700 millions d’euros, était mobilisable pour soutenir l’agriculture biologique incluant : les aides à la conversion, le Fonds Avenir Bio qui développe les filières y compris de transformation de la matière première agricole bio et le crédit d’impôt bio. 700 millions ramenés à 9 milliards, cela représente 8%.

La Cour des Comptes a estimé en 2022 dans son rapport sur les politiques publiques en bio que les moyens dédiés au bio ne sont proportionnés ni à l’objectif national fixé par la loi de 21 % de terres en bio à horizon 2030, ni aux services que cette agriculture apporte à la collectivité : baisse des coûts de dépollution de l’eau, santé des sols, maintien de l’emploi dans les zones rurales…

La Cour des comptes estimait ainsi que les dépenses publiques annuelles consacrées au traitement des flux annuels d’azote (soit les engrais de synthèse interdits en bio), d’herbicides (catégorie totalement interdite en bio et qui pèse pour 46% du chiffre d’affaires du secteur phytosanitaires) et de pesticides synthétiques étaient de 15 à 27 fois supérieures aux soutiens alloués à l’agriculture biologique².

“Pour certaines productions comme les grandes cultures, les exploitations biologiques perçoivent [après aides à la conversion] un niveau d’aides équivaut à celui alloué aux exploitations standard, et ne bénéficient donc d’aucune rémunération des services environnementaux rendus », toujours selon la Cour des comptes.

Quoique relativement peu subventionnée, l’agriculture biologique est donc estimée bonne pour la santé commune, et les finances publiques.

¹Une « aide au maintien » a existé jusqu’en 2017 pour permettre aux exploitants bio de consolider leur modèle après la conversion. La France est l’un des quatre pays européens à avoir supprimé cette aide

²La même Cour des Comptes souligne qu’entre 2015 et 2020, la part de l’État dans les aides à l’agriculture biologique a baissé. Le financement des Agences de l’eau, pour sa part, a doublé pour atteindre 30 %. Ces agences, elles, savent que soutenir l’AB est un investissement pour diminuer les dépenses de dépollution.

“Je connais mon voisin producteur, je lui fais confiance, il est presque bio”

Cette idée souligne en creux une victoire culturelle du bio : tout le monde voudrait pouvoir garantir aux consommateurs les attributs du bio…. Mais sans pour autant accepter les contraintes nécessaires, un peu comme être presque avocat, mais sans avoir passé le barreau, ou conduire sans avoir le permis.

Ce forcément « petit » producteur, s’il n’est pas bio, est bien sûr très sympathique et travaille bien. On ne peut qu’encourager la confiance et la proximité, toutefois pour être sûr que chaque euro investi chez son petit producteur a un vrai retour sur investissement quant à la préservation de l’environnement, seul un label contrôlé par un organisme indépendant peut certifier que le producteur n’a pas utilisé d’engrais et de pesticides de synthèse.

Un producteur bio est contrôlé au moins une fois par an sur son exploitation. Le contrôle inclut une visite des parcelles, le contrôle physique des produits, du bien-être animal, un audit de la comptabilité et le contrôle des flux.

Seul le producteur bio fait l’objet de tels contrôles.

Le label Eurofeuille, accompagné parfois du label AB, vous garantissent les conditions de production du produit sans pesticides de synthèse. C’est une sorte de “diplôme d’état” de l’agriculture sans aucun herbicide, et sans fongicides ni pesticides synthétiques. Le label certifie le mode de production. En matières végétales : avec uniquement les 71 molécules autorisées explicitement en bio¹ sur les 455 autorisées pour l’agriculture en Union européenne. En agroalimentaire, les produits sont transformés uniquement à partir d’ingrédients 100% bio et avec uniquement 57 additifs sur les 340 autorisés en Europe.

Un rapport sénatorial² sur l’étiquetage alimentaire souligne en effet établit que plus de 400 allégations marketing environnementales³ en France sèment la confusion chez le grand public, notamment celles qui revendiquent des attributs qui « sonnent » bio, en parlant par exemple de résidus de pesticides sur un nombre restreint de molécules testées, quand le bio est zéro utilisation de pesticides. Ou encore de cochon « bien élevé », sans détailler les conditions d’élevage ou l’utilisation ou non d’antibiotiques. Ou encore de “naturel”.

¹ https://www.agencebio.org/decouvrir-le-bio/les-textes-reglementaires/

²https://www.senat.fr/rap/r21-742/r21-742-syn.pdf

³https://www.senat.fr/rap/r21-742/r21-74210.html ?

“Les agriculteurs bio sont réfractaires au progrès”

Voilà une des idées reçues les plus retorses. Depuis plus de 40 ans, l’agriculture biologique est associée à un cliché qui mélange beatniks, hurluberlus qui se contentent d’arroser leurs plantes et de les regarder pousser sans rien faire pour améliorer leur rendement ou pour lutter contre les pucerons. Et ils font des câlins à leurs chèvres tous les soirs et labourent avec des chevaux…

Les agriculteurs bio n’aiment pas plus que les autres voir leurs plantes dévorées par des insectes, ou leurs animaux blessés et malades. La différence, c’est qu’ils s’interdisent tout recours à des molécules de synthèse. En renonçant à 384 substances sur les 455 autorisées en Union européenne pour l’agriculture standard. Ils utilisent 71 produits chimiques dits naturels, soufre, cuivre, kaolin, petit-lait, vinaigre… Pas de pschitt immédiat de destruction des insectes, des maladies. Dès lors, ils n’ont pas d’autre choix que de devenir des geeks de l’agronomie, et d’innover en permanence pour s’adapter aux sols, aux saisons et aux aléas. Le bio est technique, et les bio ont une vocation de recherche-développement permanente.

C’est ainsi que les bios développent et partagent leurs expériences en matière d’associations de cultures, pour que les plantes se protègent mutuellement (poireaux et carottes par exemple, pour éloigner mouches et teignes), voire se renforcent, comme on le constate dans de nombreuses associations entre céréales et légumineuse, des lentilles sous les courges, des moutons dans les vignes pour désherber …. Le pâturage mixte entre ovins et bovins, est un moyen de réduire la pression parasitaire, le pâturage tournant permet d’éviter de faire pâturer les animaux dans des zones infectées Et pour imaginer de nouvelles associations fructueuses, on peut compter sur les recherches menées par les scientifiques de l’INRAE (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) ou de l’ITAB (Institut technique de l’agriculture biologique), ainsi bien sûr que d’autres laboratoires dans d’autres pays. D’ailleurs, le saviez-vous ? L’INRAE est n°1 mondial en recherche agronomique, que ce soit pour l’agriculture en général, mais aussi pour l’agriculture biologique.

Les bios inventent aussi des outils nouveaux. Un exemple ? Les herbicides (dont le glyphosate) étant totalement interdits en agriculture biologique, les bios ont été à la pointe d’innovations en matière de bineuses – qui sont aujourd’hui utilisées aussi en non-bio. Ces outils, et bien d’autres, sont exposés tous les deux ans au salon « Tech & bio », qui réunit ainsi plus de 20 000 visiteurs. Allez donc faire un tour, et vous nous direz si vous pensez toujours que les bios n’utilisent pas de tracteurs ni d’outils connectés !

Et pour achever de tordre le cou au cliché du petit berger bio qui ne produit que trois crottins de chèvre, on notera qu’il existe aussi de « grandes cultures » bio : blé, maïs, soja… Les nappes phréatiques sous les grandes plaines céréalières s’en réjouissent ! On rappellera aussi que le bio se déploie en mode industriel. Car il faut bien des usines pour transformer le blé (bio) en céréales de petit-déjeuner, ou en farines puis en pâtes bio ! Cette activité dite de « transformation » est elle aussi régie par un cahier des charges spécifique, qui interdit 283 des 340 additifs autorisés dans l’industrie agro-alimentaire.

Développer ces produits transformés est une des voies d’avenir du bio. C’est en collant aux habitudes des Français que la production de bio pourra se développer massivement, par des formats pratiques qui diversifient les débouchés aux producteurs. Cette hausse de la production devrait aussi permettre, par des effets d’échelle, de réduire le prix des produits bio. Un vrai cercle vertueux… qui crée aussi de l’emploi industriel au niveau local. Usines, minoteries, ateliers de découpe, laiteries : l’avenir du bio est là, autant que dans les champs ! Les agriculteurs et transformateurs bio travaillent sous contrainte du fait des exigences du cahier des charges mais sont avant tout des entrepreneurs et doivent conjuguer créativité et rentabilité.

L’Agence BIO au SMCL 2025

Parce que le bio est à la fois une obligation et l’allié des maires, depuis 2019 l’Agence BIO est au Salon des Maires et des Collectivités Locales pour accompagner les élus en exercice et les futurs candidats à intégrer le bio au cœur de leurs politiques locales.

Le rendez-vous incontournable pour anticiper les municipales 2026 : pour rejoindre les communes qui font le bio en France, c’est du 18 au 20 novembre Porte de Versailles au pavillon 4 stand G 141.

le programme

MARDI 18 NOVEMBRE

  • 11h – 14h : animation culinaire sur la restauration collective scolaire engagée avec Renaud Fourcade, chef de cantine en lycée (Occitanie).
  • 14h30 – 17h : animation culinaire avec la communauté Ecotable et son chef Benjamin Schlumberger. L’association, sœur d’Ecotable, accélère la transition environnementale et sociale de la restauration commerciale en fédérant les professionnels engagés du secteur.

MERCREDI 19 NOVEMBRE

  • 10h30 – 12h30 : ateliers de sensibilisation à l’alimentation durable avec l’Ecole comestible qui agit sur le territoire en collaboration avec les acteurs du milieu scolaire et péri-scolaire, ainsi qu’avec les acteurs publics locaux et nationaux.
  • 12h30 – 13h15 : conférence “Au cœur des villes et villages, des repas bio pour tous les âges !” avec Anthony Beharelle de Croc la Vie et David Merdrignac de Biocoop Restauration à l’Espace Atmosphère résilience agricole et alimentaire (voir le détail plus bas).
  • 13h – 16h30 : animation culinaire sur la restauration collective scolaire engagée avec Francine Lioux, cheffe de cantine en collège (Ain). Francine Lioux a gagné ZeAward du meilleur engagement 2024 pour la restauration collective.

JEUDI 20 NOVEMBRE

  • 11h – 14h et 15h – 17h : animation culinaire sur la place du bio en formation “hôtellerie restauration” avec les élèves du lycée hôtelier de Granville qui cuisineront toute la journée, sous la supervision de leur formateur Vincent Delacour.

la conférence

Cette conférence est organisée dans le cadre du programme CuisinonsPlusBio.fr.

De nombreuses collectivités locales organisent un service de restauration pour leurs habitants. Cette vocation sociale place aujourd’hui l’alimentation durable au cœur de l’action publique. La loi EGalim fixe d’ailleurs un objectif d’achat d’au moins 20% de produits bio en restauration collective. 

Ces politiques alimentaires commencent dès le plus jeune âge, avec parfois l’organisation d’un service public de restauration en crèches qui répond aux préoccupations des parents, soucieux d’une alimentation saine et de qualité pour leurs enfants tout en répondant aux enjeux des premiers apprentissages sensoriels. 

Les collectivités organisent ensuite l’offre de restauration de l’école maternelle jusqu’au lycée. La cantine continue d’être ainsi un lieu de sociabilisation par le partage d’un repas équilibré tout en restant un lieu de sensibilisation autour des enjeux du développement durable. 

Enfin l’action sociale publique qui vise à lutter contre l’exclusion déploie également une offre alimentaire dans l’assiette de nos aînés et des plus fragiles. Les Centres Communaux ou Intercommunaux d’Action sociale (CCAS/CIAS) contribuent ainsi à lutter contre la dénutrition et l’isolement de nos aînés notamment par la gestion de maisons de retraite et la mise en place d’un service de portage de repas. 

Cette conférence mettra en lumière les récentes initiatives qui traduisent la place de la cuisine de restauration collective au cœur de la pratique du changement vers une alimentation plus durable et comment l’offre de produits bio peut s’organiser aujourd’hui pour répondre à cette demande. 

Les focus :

  • La petite enfance (enjeux autour d’une offre de repas 100% bio)
  • L’éducation au cœur du bio réacteur (l’alimentation dans les écoles, la formation, la sensibilisation)
  • L’approvisionnement en produit bio, comment faire pour en mettre plus et atteindre les objectifs de la loi EGalim